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Détournements, corruption et enrichissement illicite : Cellou Dalein Diallo, la cible principale

Le principal leader de l’opposition guinéenne affronte, à partir de ce 13 juin, une tempête politico-judiciaire. La Cour de répression des infractions économiques et financières (Crief) l’accuse de «détournement de deniers publics, corruption d’agents publics et enrichissement illicite».

Ce combat qu’il livre, treize ans après la disparition de son mentor Ba Mamadou, n’est pas que pour son honneur et sa crédibilité. C’est une lutte pour sa survie politique.

Ancien Premier ministre et leader politique, Cellou Dalein Diallo est visé par une enquête de la Crief pour «détournement de deniers publics, corruption d’agents publics et enrichissement illicite» en sa qualité de ministre au moment des faits dans l’affaire vente de deux avions et autres biens appartenant à la compagnie aérienne nationale Air Guinée. Le 24 mai 2022, il est convoqué à se présenter devant la Crief le 13 juin prochain.

Le moment des faits qui lui sont reprochés se situe entre 1996 et 2004. Durant cette période, Cellou Dalein Diallo qui avait le statut de haut fonctionnaire de la Banque centrale devient Administrateur général adjoint des Grands Projets (ACGP) à la Présidence de la République en 1995. L’année suivante, il occupe le poste de ministre des Transports, des Télécommunications et du Tourisme en même temps Gouverneur de la Guinée à la Banque mondiale. En 1997 il est ministre de l’Équipement qui gère les Transports, Travaux Publics, Télécommunications et l’Environnement. En 1999, il occupe le portefeuille de ministre des Travaux publics et des transports jusqu’en février 2004 avant d’être appelé à diriger le ministère de la Pêche.

Le 17 février 2022, Cellou Dalein Diallo donne sa version des faits au cours d’une conférence de presse. Selon lui, l’opération de vente d’Air-Guinée se situe dans le cadre d’une politique générale du désengagement de l’État et de la privation ou de fermeture des entreprises publiques.

«Un dossier a été présenté au Conseil des ministres qui a approuvé la privation de Air Guinée. C’est dans le cadre de la mise en œuvre de cette privation, puisque la Banque mondiale a envoyé un expert pour aider à la rédaction d’un Cahier de charges et d’un Dossier d’appel d’offres que la décision a été prise. L’expert en question était dans le pays, lorsque le président (Lansana Conté, Ndlr) m’a appelé, je suis allé et je l’ai trouvé avec Elhadj Mamadou Sylla. Il m’a demandé, vous êtes en train de vendre mon avion. Je dis oui, le conseil des ministres en a décidé, on a demandé à la Banque mondiale qui a mis un expert à notre disposition et qui est en train de nous aider pour la vente. Il a dit non, on a vendu les deux premiers avions à l’étranger, Mamadou Sylla veut l’acheter. Il faut le lui vendre. J’ai dit à Mamadou Sylla que s’il prend Air Guinée il va perdre et Air Guinée risquerait de disparaître. Le président a insisté, il a pris un décret en ordonnant la vente de l’avion à Mamadou Sylla. J’ai signé et j’ai vérifié que le prix était bon pour la Guinée. Mais l’opération de liquidation d’Air Guinée s’est passée au ministère des Finances. C’est lui qui a fixé les prix, et c’est lui qui a encaissé. L’avion était en ce moment même en Israël en révision ou en réparation».

Les plus fervents partisans de Diallo croient mordicus qu’il a fait un travail utile à la Guinée en prévenant l’acquéreur du risque économique et financier de s’engager dans une telle entreprise avant d’apposer sa signature là où elle était demandée.

Le Boeing 737 et le Dash 7

Le procureur de la Crief, Ali Touré, estime que lors de la cession d’Air Guinée en 2002, M. Diallo et ses complices – il cite aussi le ministre de l’Economie et des finances, Cheick Amadou Camara dans la vente d’un Boeing 737, d’un avion à turbopropulseurs de type Dash 7 et des pièces de rechange, du siège de la compagnie à Conakry et d’installations à l’aéroport – ont fait des infractions de «malversation dans la passation des marchés publics, corruption, enrichissement illicite, détournement de deniers publics, recel de biens et complicité».

Ces accusations ne sont pas un fait nouveau dans le paysage socioéconomique guinéen. Les plus farouches détracteurs et les challengers de Diallo ont brandi les résultats d’audits successifs menés sur ce dossier pendant les élections de 2010, 2015 et 2020 pour tenter de salir son image de leader charismatique ou encore pour réduire ses chances d’occuper le fauteuil présidentiel.

Aujourd’hui encore sous le régime Kaki, Cellou Dalein Diallo subit l’assaut de ses adversaires connus ou anonymes agissant sous le couvert de «la lutte contre la corruption et la délinquance financière» des anciens dignitaires du régime Conté et qui ne reculent devant rien pour le spolier de ses propriétés, salir sa réputation de gestionnaire honnête et intègre, le plumer à toutes les occasions. Pis encore, ils ne s’empêchent pas de prendre part aux tours de passe-passe et aux politiques dilatoires visant à le désigner coupable avant le verdict.

Le 13 juin est le début d’un nouveau combat que Dalein Diallo livre seul devant Dame Thémis, treize ans après la disparition de son mentor Ba Mamadou qui avait porté son choix sur lui pour continuer l’œuvre commencée en 1990. S’il s’en sort la tête haute sans bras et côtes cassées comme le 28 septembre 2009 face à la junte du capitaine Dadis Camara, ce serait tant mieux pour son leadership et sa crédibilité. Toutefois, s’il se laisse condamner par la justice du régime en place, ses adversaires auront gagné leur pari de l’éjecter de la course à la présidence de la République.

Par Gordio Kane

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