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Guinée, où en est-on avec les Violences basées sur le Genre ?

 

« La violence basée sur le genre est l’une des violations des droits de l’homme les plus étendues. Elle peut être physique, sexuelle, psychologique ou encore économique et elle ne connait pas de frontières, d’âge, de race, de culture, de richesse, etc.» En Guinée, il ressort de l’observation des comportements socioculturels que le phénomène des violences basées sur le genre (VGB) bat son plein, particulièrement au niveau des jeunes filles âgées de 07 à 12 ans qui sont souvent victimes des Mutilations génitales féminines (MGF) ou encore de l’excision. Une pratique qui, aux dires des spécialistes en santé, est une violence sévère infligée aux jeunes filles et femmes selon les régions, les communautés et les coutumes.

En Guinée, il est recensé cinq types de violences considérées comme une forme de Violence basée sur le genre (Vbg) avec des dimensions plus ou moins différentes selon le lieu de résidence, le groupe d’âge, le sexe, la catégorie professionnelle ou ethnique. Il s’agit des violences physique, sexuelle et conjugale. Le ministère en charge de l’Action sociale et de la Promotion féminine et de l’Enfance mentionne aussi les mutilations génitales féminines, les violences psychologiques, économiques et celles  dues aux actes malveillants.

Les mutilations génitales féminines (excision) constituent aujourd’hui les formes de violences les plus graves et les plus sévèrement infligées aux filles en Guinée. C’est pourquoi d’ailleurs notre dossier s’articule plus sur la pratique de l’excision qui est jugée comme un véritable problème de santé chez la femme.

Selon ces spécialistes 91,8% de femmes déclarent avoir subi cette pratique. La proportion de femmes excisées dépasse les 80% dans chacune des huit régions du pays et il n’y a aucune différence significative entre les zones de résidence ou les groupes ethniques.

Parfois, des cérémonies grandioses sont organisées dans ce sens et des filles excisées habillées en uniforme menues de bâtons sont visibles partout. Des mères de famille rencontrées à Conakry ont exprimé leurs sentiments d’avoir excisé leurs filles. C’est le cas de M’mah Sylla qui a affirmé que: « Aujourd’hui, je suis très heureuse car ma fille est devenue une femme normale ».

Dans la même lancée, M’mah Sylla a déclaré : « Qu’ils montent ou qu’ils descendent ces promoteurs de l’abandon de l’excision, nous la pratiquerons car cette pratique est une Sunna ».

Contrairement à ces mères de famille, plusieurs jeunes filles et femmes victimes de l’excision soutiennent avoir eu des séquelles. Elles confirment les douleurs liées à l’excision lors des rapports sexuels.

C’est le cas d’Adama Hawa Diallo qui témoigne : « Moi, j’ai été victime de l’excision. Cela m’a causé des douleurs internes. Quand je fais le rapport sexuel avec mon mari je pleurais. Du coup, mon mari m’a quitté. Quand on m’avait excisée, on a dû couper tout mon clitoris. Je n’ai pas le gout du rapport. »

Pour sa part, Aicha Touré, diplômée en comptabilité et gestion, victime de l’excision à bas âge, condamne ses parents de l’avoir fait subir ce rituel : « j’ai été victime depuis toute petite. Mais j’avoue que l’excision est une mauvaise pratique qu’on exerce sur les jeunes filles. Moi je ne pratiquerai pas l’excision sur ma fille ni sur une enfant d’autrui ».

 Comment sauver les femmes et les filles …

C’est pourquoi,  le gouvernement guinéen à travers le ministère de l’Action sociale, de la Promotion féminine et de l’Enfance en partenariat avec certaines agences du Système des Nations Unies, en l’occurrence l’Unfpa, le Pnud, l’Unicef et l’Oms s’est intéressé à la question dans le but de trouver des voies et moyens sur  comment l’on pourrait trouver une solution en vue de pouvoir sauver les femmes et les filles à travers des séries de sensibilisations sur les conséquences et les impacts de la Violence basée sur le genre (Vbg).

Ajouté au problème de l’excision que la femme et la jeune fille subissent et qui n’est pas tout à fait résolue, nous avons les violences physiques qui sont une violence prépondérante, qui est aussi une violence très répandue dans le pays et cela dans toutes les communautés. Elles sont fréquentes surtout dans les régions de FaranahKindia et Conakry, la capitale. La prépondérance s’élève à 59% chez les hommes et 55,7% chez les femmes. Et parmi ces violences physiques les plus utilisées dans l’ensemble, on peut citer entre autres les gifles, les bastonnades et autres coups qui s’élèvent 52,1%.

Les violences sexuelles à ce niveau, les femmes restent largement les plus victimes de ce type de violence (29,3% contre 18,2 % chez les hommes au niveau national). Ce phénomène est plus fréquent en milieu urbain.

De toutes les violences faites aux femmes, les violences conjugales sont les plus fréquentes et se présentent sous plusieurs formes. Elles peuvent être des agressions physiques, des violences psychologiques ou sexuelles, des menaces ou des contraintes pouvant aller jusqu’à la mort.  Plus d’une femme sur deux (63%) en sont victimes avec des proportions plus élevées en zone urbaine et dans les régions de FaranahKindiaConakry et Nzérékoré. Les violences physiques, la menace ou l’attaque, l’humiliation ou des empoignades de la part de leur conjoint, sont les formes les plus graves de violences conjugales.

En 2016, le ministère de l’Action sociale, de la Promotion féminine et de l’Enfance, avec l’appui technique et financier de l’Unfpa a permis d’identifier huit principaux types de Violences basées sur le genre (Vbg) pratiquées dans le pays avec une prévalence cumulée de 92% chez les femmes de 15 à 64 ans, mais surtout la violence la plus répandue dans le pays et à des formes différentes, selon les zones et les communautés est constitué par les mutilations génitales féminines (excision) avec une prévalence de 98%.

Causes de décès et d’incapacités chez les 16-44 ans

 Pour l’Organisation mondiale de la santé (Oms), la violence contre les femmes et les filles est ainsi l’une des causes principales de décès et d’incapacités pour la tranche féminine des 16-44 ans.

L’autre aspect, c’est quel recours face aux Vbg constitue un véritable problème de réticence pour les victimes, sur quatre victimes de violences, seule une qui accepte de parler et parfois dans l’anonymat cela par peur d’être reconnue soit par la famille, les belles familles pour certaine et surtout par la société.

Cette situation est la même dans le cas particulier des violences conjugales. Moins de 5 % des hommes et 3 % des femmes ayant porté plainte après la dernière violence subie ont reçu de réponse. Parmi ceux-ci, une faible proportion (3,5 % chez les hommes et 1,9 % chez les femmes) a été satisfaite de la réponse reçue.

C’est pourquoi notre reportage sur cette thématique a pour objectif de contribuer non seulement à l’accélération des femmes, en fournissant des informations pertinentes et fiables, au niveau national.

D’ailleurs dans le souci de cerner les problèmes à ce niveau, des rencontres à travers des séminaires, des ateliers, de séries de sensibilisation  ont été organisés par le gouvernement à travers le ministère de l’Action sociale et de la Promotion féminine et de l’Enfance, en partenariat avec les partenaires  et des ONG qui luttent contre les VBG dans le but de sensibiliser la population sur les conséquences et les méfaits de cette pratique qui affectent la population surtout les personnes victimes tant sur le plan physique que moral, sans oublier les conséquences économique et sociale que ça engendre dans le pays.

Paradoxalement, ces discriminations et violences à l’égard de la femme sont parfois encouragées par la loi et la pratique des institutions étatiques, notamment dans le droit matrimonial et de succession.

La domination de la femme, qui doit rester soumise et obéissante, trouve son origine et sa justification non seulement dans les coutumes et mœurs au sein des ethnies guinéennes, mais aussi dans le code civil guinéen sans oublier la mauvaise interprétation erronée des règles et traditions de l’islam, une religion pratiquée par plus de 85% des guinéennes.

Selon la directrice nationale de l’Action, il y a plusieurs formes de violences basées sur le genre qui atteignent considérablement à l’intégrité physique et morale de la femme.

Malheureusement, ces pratiques considérées comme de violences faites aux femmes persistent toujours en Guinée comme par exemple l’excision qui bat son plein malgré les études médicales qui démontrent les conséquences que cette pratique joue sur la santé de la jeune fille ou femme comme par exemple les complications liées à la grossesse et à l’accouchement.

Vacances scolaires …

En Guinée ce phénomène est souvent pratiqué dans les périodes de grandes vacances scolaires à travers tout le pays.

Pour mettre fin aux violences faites aux femmes, vous le savez sans doute qu’en 1993, l’Assemblée générale des Nations Unies, a adopté une déclaration sur l’élimination de la violence à l’égard des femmes sur toutes ses formes, et a demandé que tout soit mis en œuvre pour la faire connaître et respecter.

La déclaration définit notamment la violence faite aux femmes comme « tout acte de violences fondées sur l’appartenance au sexe féminin, causant ou susceptible de causer aux femmes des préjudices ou des souffrances physiques ou psychologiques et comprenant la menace de tels actes, la contrainte ou la privation arbitraire de liberté, que ce soit dans la vie publique ou la vie privé ».

Sur le plan international, plus de six femmes sur dix sont victimes d’une forme de violences physique et/ou sexuelle dans leur vie.

La lutte contre les violences faites aux femmes et pour la reconnaissance de la place et du rôle qui sont les leurs dans toute la société constituent, depuis de nombreuses années, des objectifs fondamentaux à atteindre par la communauté internationale. Au cours des quatre dernières décennies notamment, la communauté internationale a adopté de nombreux plans d’actions prévoyant des actions concrètes à entreprendre pour lutter contre les violences faites aux femmes et à leur conférer une place centrale dans la conduite des affaires du monde.

C’est ainsi qu’en septembre 2015, les États membres des Nations Unies ont adopté les 17 Objectifs du développement durable (Odd) à atteindre d’ici 2030, qui se sont substitués aux Objectifs du millénaire pour le Développement (Omd).

Quant à la Guinée, la grande majorité de la population reste fortement influencée par des préjugés et stéréotypes qui assignent à l’homme et à la femme des rôles et fonctions sociaux qui établissement un rapport de dominant-dominé en fonction de leur sexe. Cette perception des rapports homme-femme instaure une véritable suprématie du premier sur la seconde.

Ce reportage m’a permis de cibler les victimes qui sont principalement les femmes et les jeunes filles qui ont un âge qui varient entre 15-64 ans. Les hommes aussi n’ont pas été occulté dans mon reportage parce qu’ils ne sont pas en marge de ce fléau.

L’objectif est donc pour moi en tant que femme de médias, de réveiller les consciences des gouvernants sur les conséquences de la pratique notamment de l’excision, de contribuer à l’éveil des consciences de la population en vue d’un changement de comportement.  Nous avons aussi pensé à contribuer à l’accélération de la lutte contre les pratiques néfastes de ce fléau dans le pays qui affecte la population à tous les niveaux tant sur le plan économique, social que politique.

Cette démarche a permis aussi de mettre les doigts sur ces éléments néfastes qui affectent aujourd’hui toute la population afin de pouvoir lutter contre ce fléau et aussi identifier des mesures d’atténuation de la vulnérabilité des jeunes filles, des femmes et des populations marginalisées (sur la base de leur classe sociale, caste, croyance, orientation sexuelle, identité de genre, profession, statut migratoire ou situation de handicap) face aux violences basées sur le genre.

Ce reportage qui est axé sur les violences basées sur le genre vise également à identifier et à écrire les causes socioculturelle et économique qui poussent les populations à épouser ce fléau d’une part et d’écrire la perception que les populations se font des Vbg.

Pour mieux comprendre le pourquoi de ce genre de fait, l’on doit faire une évaluation de l’ampleur des types des Vbg en termes de prévalence, d’incidence selon les régions, les ethnies, les groupes d’âges, le sexe, la religion, le milieu de résidence afin d’identifier les principaux groupes de population et les zones selon le degré de risque sans oublier les dispositions institutionnelles et juridiques prises pour réduire les Vbg.

Pour mieux comprendre les causes des Vbg, mon reportage vise une catégorie de population (cible) qui m’a permis de comprendre l’environnement des Vbg. Ces catégories sont entre autres : les femmes, les jeunes filles, les hommes, les responsables des structures et les institutions en charge de la lutte contre les Vbg en Guinée, les forces de défense et de sécurité, les victimes des Vbg et les informateurs-clés.

Les femmes et les jeunes filles qui sont généralement perçues comme des personnes vulnérables sont très souvent victimes de ce genre de violence. Les causes de leurs vulnérabilités sont multiples mais la plus importante c’est l’aspect économique.

Les femmes deviennent aussi plus vulnérables au harcèlement et à la violence, et la pauvreté accrue et la dissolution de la communauté augmentent également la propension à la violence. Dans l’ensemble, en Guinée, 11,9 % des victimes affirment avoir des conséquences des violences subies sur leur santé physique. Cette proportion est presque de même quel que soit le milieu de résidence.

Toutefois, elle varie selon le sexe et la région administrative. Elle est plus importante au niveau des femmes (15 %) et dans les régions administratives de Nzérékoré (23,1%) et Boké (15,6 %).

Autres informations sur les problèmes de santé dus à l’excision fréquemment cités sont le saignement excessif (52,7%), les difficultés liées aux règles (35,3%), les difficultés d’uriner (26,9 %), les infections (21,7%) et les difficultés à l’accouchement (16,6%). La même tendance est observée quel que soit le milieu de résidence et la région administrative.

 Par Kadiatou Thierno Diallo

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