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Quand Marcel met Dadis et Thiégboro sur la rôtisserie dans le Procès du 28-septembre 2009

Le neveu de Dadis avait opté pour la négation des faits lors de sa première comparution devant le tribunal. Mais ce lundi 10 juillet, à sa demande, il a livré sa part de vérité qui place l’ex-président Moussa Dadis Camara et Moussa Thiégboro Camara sur la rôtisserie et tresse des couronnes de lauriers à leur co-accusé Toumba Diakité. Il est en détention depuis le 31 mars 2009 dans le cadre des massacres du 28 septembre 2009 qui ont fait plus de 150 morts, des portés disparus, des centaines de femmes violées, des mutilés à vie, et des dégâts matériels.

Onze suspects, dont plusieurs personnalités gouvernementales et militaires de haut rang, sont poursuivis, entre autres chefs d’accusations, pour «meurtres, assassinats, viols, pillage, incendie volontaire, outrage, vol à main armée, coup et blessure volontaire».

Le ‘‘neveu de Dadis’’ a fait des aveux le lundi 10 juillet 2023 devant le tribunal criminel de Dixinn délocalisé à la Cour d’appel de Conakry à Kaloum où il est jugé en compagnie de plusieurs accusés dont le président Dadis Camara, le colonel Moussa Thiégboro Camara et le commandant Aboubacar Sidiki Diakité dit Toumba, le capitaine Marcel Guilavogui a repris la parole ce lundi.

A  titre d’introduction, l’accusé Marcel Guilavogui a déclaré: « J’ai décidé de dire la vérité  dans cette affaire, parce que j’avais gardé le silence. Je voudrais prendre la parole pour éclairer le peuple de Guinée et le tribunal dans cette affaire», de massacre qui fait plus de 150 morts, des portés disparus, des centaines de femmes violées, des mutilés à vie et de nombreux dégâts matériels.

Extraits

Le capitaine Guilavogui a affirmé, entre autres : «Je suis prêt à répondre à toute éventuelle question parce qu’il faut que la vérité sonne. Je suis venu faire une nouvelle déclaration. J’ai adopté cette stratégie qui est une stratégie militaire : Pointe en avant, base arrière, car c’est le terrain qui commande le combattant. J’ai décidé de dire la vérité. (…) Monsieur le président du tribunal, je commencerai par dire que le diable est tombé dans l’eau chaude. Cette plainte a échoué. Ça ne marchera pas ! (…) Dadis, enlève-moi ici. Mes enfants ont grandi derrière moi. Je suis en 14ème année de détention, et vous vous étiez à Ouagadougou avec votre famille.

Faites-moi quitter ici ! Soyez un militaire pour dire la vérité et assumer vos responsabilités. Dadis doit également plaider la cause des victimes que sont nos mamans, nos sœurs, nos cousins et cousines. (…)Je suis la clé du pouvoir du capitaine Moussa Dadis Camara et Toumba est la porte principale (…). Le président Dadis m’a trahi. (…). Viens demander pardon au peuple de Guinée. Ici, ce n’est pas une question de la Forêt, mais de la Guinée. Président Dadis, vous et moi sommes allés dans plusieurs endroits pour avoir le pouvoir. (…) Marcel n’aime pas la trahison, il ne trahit pas. Mais quand tu le trahis, il te mord». 

Marcel confirme sa présence au stade du 28-septembre 

Le capitaine Marcel Guilavogui confirme qu’il était présent au stade. Toutefois, affirme le neveu de Dadis, « je n’ai pas vu de corps. Je n’ai pas passé beaucoup de temps au stade. S’il y avait eu des morts au moment où je quittais, je n’ai pas constaté» cela.

« Je jure devant Dieu, je n’ai ni tué ni blessé ni violé au stade. Je ne suis pas de ce genre. L’homme qui est devant vous est plutôt un sauveur. Toute ma promotion peut témoigner que je suis contre un militaire indiscipliné, un militaire brigand. Quand je voyais un caporal dans un pick-up, je vais te demander où tu as pris l’argent pour acheter ce véhicule. Non, ce n’est pas la garde présidentielle. Je veux être clair, que le président Dadis nous enlève ici. C’est lui qui a validé ce massacre. J’ai trop souffert dans ça. Quatorze ans alors que je suis innocent. C’est lui qui est allé habiller les jeunes soldats et les envoyer au stade. On n’est pas instructeur pour connaître les hommes de Kaléyah. Parmi les hommes au stade, il y avait des femmes qui étaient bien habillées. Mais (…) il y avait de la pagaille. Je l’avais signalée au commandant Toumba. On pouvait même voir des gendarmes porter des bérets rouges. Leurs soldats qu’ils ont déployés, ils les ont habillés à leur manière. Il y avait des hommes en maillot de Chelsea.» 

Foromo, le féticheur 

«Il n’était pas un marabout, mais un féticheur. Nous savons tous ce que cela signifie, parce que nous sommes tous africains. La première fois que j’ai vu Foromo, c’était au quartier Sonfonia sous la conduite du président Moussa Dadis Camara pour préparer d’avance la prise du pouvoir et c’était bien avant le décès du général Lan-sana Conté. Nous avons fait un pacte chez Foromo et juré d’être permanents aux côtés du président Dadis; partout où il sera, de le protéger et de ne jamais le trahir. (…)Toumba, le président Dadis, le commandant du salon Escobar (…) et moi. Nous avons même pris des pare-balles contre d’éventuelles attaques de la part des ennemis.» 

Les faits

Selon le rapport de la commission d’enquête internationale mandatée par l’ONU publié trois mois après les faits, le 28 septembre 2009 et les suivants, 156 personnes ont été tuées et des milliers blessées avec une cruauté effrénée, au moins 109 femmes ont été violées.

La commission mandatée par l’Onu  a confirmé avoir identifié 156 personnes tuées ou disparues, soit 67 personnes tuées et dont les corps ont été remis aux familles, 40 autres qui ont été vues mortes au stade ou dans les morgues mais dont les corps ont disparu, ainsi que 49 autres vues au stade dont le sort reste inconnu. Elle confirme qu’au moins 109 femmes ont été victimes de viols et d’autres violences sexuelles, y compris de mutilations sexuelles et d’esclavage sexuel. Plusieurs femmes ont succombé à leurs blessures suite à des agressions sexuelles particulièrement cruelles. Elle confirme également des centaines d’autres cas de torture ou de traitements cruels, inhumains ou dégradants. Des dizaines de personnes ont été arrêtées et détenues arbitrairement dans les camps militaires d’Alpha Yaya Diallo et de Koundara ainsi qu’à la caserne de la police anti-émeute (CMIS) ou elles ont été torturées. Les forces de sécurité ont aussi systématiquement dépouille les manifestants de leurs biens et ont commis des actes de pillage.

Selon Elise Kepler, directrice adjointe du programme Justice internationale à Human Rights Watch, ce procès permet  «aux victimes de faire un pas important vers une justice dont elles ont grandement besoin après les crimes horribles commis dans le stade». 

Les onze présumés auteurs en prison 

Les onze accusés sont tous en détention. Le capitaine Cécé Marcel Guilavogui y séjourne depuis le 18 juin 2010. Ses autres compagnons de bagne Cécé Raphaël Haba (le procès a révélé qu’il n’était pas au stade au moment des faits), le 14 mai 2010, Alpha Amadou Diallo le 14 mai 2010 et Paul Mansa Guilavogui le 22 mai 2015.

Sont également en prison, l’ancien président, le capitaine Moussa Dadis Camara. L’ancien Secrétaire général à la présidence chargé de la lutte anti-drogue et du crime organisé, le colonel Moussa Tiégboro Camara. L’ancien ministre de la Garde présidentielle, colonel Claude Pivi. L’ancien ministre de la Santé, colonel Abdoulaye Chérif Diaby. Les nommés Ibrahima Camara dit Kalonzo (qui n’était pas au stade le jour des faits), Blaise Goumou, Mamadou Aliou Keita tous incarcérés le 27 septembre 2022.

Quant à l’ancien aide de camp, le commandant Aboubacar Sidiki Diakité dit Toumba, en fuite depuis qu’il a tiré une balle au flanc droit de la tête de Dadis Camara, a été mis aux arrêts à Dakar le 16 décembre 2016. Le 12 mars 2017, il a été extradé. Son transfèrement à la Maison centrale de Conakry a eu lieu le 14 mars 2017. 

Par Diallo Alpha in Le Populaire 

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