Depuis sa tendre genèse, la République de Guinée n’a cessé d’irradier autour d’elle l’image d’un pays, d’une société en ébullition récurrente. Tient-elle cette mauvaise réputation des querelles de clocher entre partis politiques naissants à la fin de la colonisation, en quête de légitimation et de notoriété ?
Sous la révolution les multiples vrais et faux complots ont opposé les Guinéens et provoqué des fractures béantes dans lesquelles se sont engouffrés et reproduits les germes de l’ethnocentrisme de la haine, de la méfiance et de la défiance.
La disparition de la révolution et le triomphe du libéralisme tous azimuts n’ont pas dissipé ces tares et ces défauts de la société guinéenne, qui taraudent et rongent, comme un cancer, les régimes politiques et les polluent. Les Guinéens se regardent dorénavant en chiens de faïence. Les moindres conflits, parfois simplement, personnels, sont évalués à l’échelle intercommunautaire, deviennent fratricides et meurtriers.
Les Guinéens, de prime abord, paraissent irréconciliables, particulièrement en périodes électorales. Les partis politiques, notamment les plus importants d’essence ethnocentristes, s’arcboutent sur leurs certitudes sectaires et grégaires.
Les espaces d’échanges et d’exercice des activités de la société civile s’étiolent. Ceux qui n’ont pas la même appartenance politique ou ethnique se parlent peu, se font peu confiance. Cette tendance s’est exacerbée à partir du crépuscule de l’administration Conté et s’est poursuivie jusqu’à la chute du Pr Alpha Condé en traversant la deuxième Transition conduite par le tandem Dadis-Konaté.
L’antagonisme entre clans ethno-politiques a affaibli les tentatives et les efforts de dialogue. C’est pour cela que les initiatives du CNRD et du gouvernement en matière de dialogue ont ressemblé au départ à une simple vue de l’esprit, une chimère et ont donc connu un début laborieux.
Heureusement que le Premier Ministre, Dr Bernard Goumou a rapidement et parfaitement mesuré l’importance des enjeux et dégagé la stratégie pertinente pour organiser l’espace d’un dialogue fructueux, fécond.
Après avoir opté pour le choix de trois (3 ) facilitatrices pour conduire en synergie avec le médiateur de la CEDEAO les travaux requis par le dialogue, il s’est attelé, à son corps défendant, à regrouper tous les acteurs Socio-politiques, sous l’arbre à palabre, comme au bon vieux temps, dans la sage Afrique des forets et des savanes et s’est alors armé de son bâton de pèlerin pour aller par monts et par vauxrépandre la parole d’amour, de paix et de dialogue au sein des partis et des ONG.
Il s’agit pour lui de convaincre même les irréductibles afin que « la grande famille Guinée » se retrouve et se réconcilie avec elle-même car il est convaincu qu’au-dessus de la Guinée, il n’y a rien d’autre.
La Guinée est ce que tous les Guinéens ont en commun, en partage. C’est le dénominateur commun. L’identifiant qui s’impose à eux. Réussira-il ? Il a l’étoffe, l’ambition, l’intelligence et l’énergie pour gagner son pari.
Abraham K. DORE
