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Binta Laly Sow dit tout sur sa carrière musicale

Fatoumata Binta Laly Sow aujourd’hui 78 ans. Cette icône de la musique pastorale a commencé à faire la musique à l’âge de 13 ans dans son Manga Kouloun natal, sous-préfecture de Bourouwal à Télimélé. L’une des plus anciennes cités peuhles de l’Ouest foutanien. Entretien.

Le Populaire: Comment et où avez-vous  appris à chanter ?
J’ai appris à chanter dans mon village, dans les champs pendant la période de désherbage de riz. C’était au temps l’époque coloniale. A cette époque-là, les chefs de canton avaient des champs. Et ce sont les populations locales qui y travaillaient. Moi, pendant la période de désherbage, je suivais  mes sœurs de même père. Le travail était collectif. Et moi, je chantais pour nous. Finalement, mes sœurs me demandaient de les suivre partout où elles travaillaient, moi j’étais présente pour chanter et elles m’accompagnaient dans les refrains.  On chantait ensemble.

C’est comme cela que j’ai fini par avoir une renommée dans la contrée. Un jour, une personne âgée du nom de Sadio Sabi m’a appelé et a proposé de m’initier au chant. Je lui ai demandé d’obtenir la permission de mon chèr père Thierno Hamidou, puisque je ne pouvais pas prendre cette décision à son insu. Quand il est venu à notre domicile, mon père a refusé catégoriquement la proposition, malgré l’insistance du vieux Sadio Sabi. Finalement, celui-ci a fait appel à un grand érudit de notre village qui a intercédé en ma faveur, et mon cher père a fini par accorder la permission au vieux Sadio Sabi et à moi sa bénédiction. A partir de ce moment-là, je suis allée à l’école du vieux Sadio Sabi qui m’a initié au chant. Je suis restée à ses côtés, jusqu’au moment où il m’a donné la permission d’évoluer en solo. C’est à partir de là que j’ai commencé à voyager loin de mon Laly natal. J’ai commencé par la Gambie, puis j’ai fait le Sénégal, Dakar notamment.

Ensuite, au cours d’un de mes voyages en Guinée Forestière, j’ai rencontré un homme généreux du nom de Bella Manta Diallo qui m’a demandé de lui dédier une chanson. On s’est entendu et j’ai fait une cassette qui portait son nom. Ça a été mon premier album. Il a pris la cassette et l’a remise Amadou Djouldé Sall de Waréya, paix à son âme !, qui est devenu par la suite mon producteur.

Cet album a été suivi d’un autre qu’on a appelé Tchontchan Welli. Après cela, je suis allée à Abidjan, mais pas dans le cadre de musique. A mon retour, Sall est allé me chercher à Sangoyah chez Sow Soulaï. On a encore enregistré une cassette avec son neveu Lamarana Barry, que son âme repose en paix ! A la sortie l’album Waliyabhé Fouta, M. Diouldé Sall m’a confié à Mahmoudou  Maci Diallo.

Après, nous sommes allés faire Bhouloun Djoûri à Abidjan. Celui-ci a été suivi par Foulanîyou. J’ai effectué des tournées en France, Belgique, Espagne, Portugal, Hollande, Italie et en Allemagne. Avant cela, j’avais déjà été invitée aux Etas Unis. Dieu m’a fait grâce. Je travaille en commun accord avec Mahmoudou Maci Diallo parce qu’il faut toujours se faire accompagner, assister et aider pour évoluer. Comme on le dit chez nous les peuls, quand tu aperçois  une orange fixée très haut sur les branches, si tu n’as pas une gaule pour la cueillir, tu continueras à la regarder, mais tu ne parviendras jamais à la cueillir.

Vous avez d’autres albums à votre actif ?
Oui, après Bella Manta Diallo, Tchontchan Wéli, tous en musique traditionnelle, il y a eu Waliyabhé FoutaBhouloun DjoûriFoulaniyouUnion sacrée réalisé avec Baba Maal, puis, Top star1 et et Baraka.

 On dit que tout début est difficile. Alors, quelles sont les difficultés que vous avez rencontrées pendant la réalisation de votre premier Album ?
Mon premier album a été Bela Manta Diallo. Mais je vous le dis, à ce moment-là, on n’avait pas de difficultés. A l’époque, quand on enregistrait un album, le producteur nous donnait beaucoup d’argent.

Vous êtes mondialement connue. Est-ce que vous parvenez à vivre dignement de votre musique aujourd’hui ?
Je pense qu’il faut travailler parce que chaque personne a sa chance, mais qu’on ne perçoit qu’au bout de l’effort. Dans d’autres pays, la musique est une grande source de revenue, mais pas en Guinée ici.

 Parmi tous vos albums lequel vous plait le plus ?
Je ne sais pas si le public apprécie de la même manière que moi, mais l’artiste que suis  aime toutes ses œuvres sans exception.

 Quel est l’album qui vous a causé plus de difficultés à sa réalisation ?
Tous les albums n’ont pas été difficiles à réaliser. Il n’y en a pas un qui nous ait causé de problèmes, parce que moi, je n’écris pas mes albums. Aucun de mes chansons n’a été écrit. En vérité, ce que tu mûris dans ta tête ne va pas te causer de difficultés.

 Vous dites que vous n’écrivez pas vos chansons.
Oui, moi je n’écris pas.

 Alors comment vous faites pour les mémoriser toutes ?
Je vous dis encore, moi, mes chansons ne sont pas écrites. Je mémorise tout dans ma tête. L’album qu’il soit de 10 titres ou plus, je peux le mémoriser sans difficulté.

 Vous avez chanté en duo avec l’artiste sénégalais Baba Maal. Comment est venu ce projet ?
C’est un jour, j’étais invité à me produire sur scène à Dakar au stade Amadou Barry, ça c’est vers Pikine. Je me rappelle que Baba Maal était à l’école. Quand il est rentré à la maison, on lui a dit que l’artiste Binta Laly Sow doit jouer à Dakar. Il est venu la nuit à mon concert. Il a pris le micro et a chanté devant le public et a dit qu’il aime ma musique. C’est comme ça, j’ai fait la connaissance de Baba Maal, et le projet est né. Aujourd’hui, nous sommes devenus des amis. Et depuis, s’il a un festival, il fait appel à M. Mahmoudou  Maci pour qu’on y aille ensemble. On est allé jusqu’en Mauritanie pour un festival. Il est aussi devenu ami avec Petit Yéro. Nous sommes devenus comme des personnes de même père et même mère.

 Nous avons appris que vous préparez un nouvel album avec Baba Maal. Parlez-nous-en ?
Oui, c’est vrai. Nous avons un grand projet avec Baba Maal. On a chanté quelques chansons, mais je ne peux pas t’en dire plus. Cela revient à mon manager de parler de cet album.

 Cet album va marquer vos années de votre succès. Pensez-vous qu’il puisse plaire à vos fans ?
C’est dieu qui sait. Je souhaite qu’il soit vendu comme les précédents, voire plus. Mais on dit que tout est à Allah et tout revient à Allah. C’est Lui qui dispose de tout et qui décide de tout.

 Après cet album qui va marquer votre carrière. Avez-vous d’autres projets musicaux ?
J’ai prévu de faire l’album jubilé qui va marquer la fin de ma carrière musicale, mais je ne sais pas c’est en quelle année que cela aura lieu.

 Nous avons appris que vous voulez faire le pèlerinage à la Mecque. Cela va-t-il avoir lieu avant ou après la fin de votre carrière musique?
Mon souhait est de préparer deux albums de mes années de succès et l’album jubilé avant d’effectuer le pèlerinage aux Lieux saints de l’Islam.

Avez-vous pensé à préparer la relève, soit vos enfants ou d’autres, que vous pourriez peut être formés?
Moi, je n’ai eu que 4 enfants tous des garçons, mais ils sont tous décédés, paix à leurs âmes ! J’ai adopté les enfants de mes petites sœurs. Et parmi eux aucun n’a appris à chanter. Certains on fini leurs études  et d’autres sont à l’école ou apprennent des métiers. Mais, vous faites bien de me poser la question. Et je vous dis: oui !, Binta Laly est entrain de former de très bon continuateurs pour assurer la relève. Et comme je vous l’ai confié, je vais effectivement arrêter de chanter, mais je vais continuer à former d’autres pour transmettre le savoir. Ainsi, le jour où Allah le voudra, il me fera appel et moi je partirai le cœur tranquille.

A moins que vous n’ayez quelque chose à ajouter, il ne me reste plus qu’à vous remercier de m’avoir accordé cet entretien.

Je remercie tout le monde, les jeunes et les vieux hommes comme femmes. Je demande aussi aux artistes de redoubler d’efforts puisque c’est le travail qui paie. L’artiste doit travailler pour mériter. Je demande aussi aux managers de bien  soutenir les artistes, de ne pas nous prendre selon nos comportements, mais selon leur conscience personnelle.

 Entretien réalisé par
Abdoul Malick Diallo

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