L’incendie suivi de l’explosion du principal dépôt pétrolier de Coronthie, le 18 décembre 2023, fait une vingtaine de morts. Des centaines de blessés, des sans-abris et un désastre environnemental sans précédent sont enregistrés, selon le bilan provisoire. Kaloum, la principale zone sinistrée, et toute la capitale Conakry vivent sous des nuages d’air pollués par le désastre pétrolier. Le port du masque est recommandé à tous les habitants afin d’éviter de contracter certaines maladies respiratoires causées par la fumée toxique qui enveloppe le Tout-Conakry.
Devant cette situation d’urgence nationale, élèves et étudiants bénéficient d’un congé de fin d’année. Les travailleurs sont priés de rester chez eux. La vente de carburant est stoppée, les stations-service disposant de carburant sont fermées jusqu’à nouvel ordre.
Depuis ce lundi noir, l’accès au centre-ville de Kaloum est filtré. Le quartier de Coronthie qui abrite ce dépôt de 63 millions de litres de gasoil et de 20 millions de fuel lourd, reste fermé au public. Le Garde des Sceaux, ministre de la justice et des droits de l’homme, Alphonse Charles Wright, annonce le 19 décembre 2023 l’ouverture d’une information judiciaire avec la mise en place d’un pool d’enquêteurs, composé de la gendarmerie, de la police et de la protection civile. Le bilan provisoire de l’incendie et l’explosion du principal dépôt de carburant passe d’une dizaine à une vingtaine de morts.
Les blessés se comptent par centaines. Mercredi soir, le président de la Transition, le colonel Mamadi Doumbouya, décrète trois jours de deuil national à partir du jeudi 21 décembre 2023.
Le message du Colonel Doumbouya
Sur sa page Facebook, le chef de l’Etat poste un message de compassion. Un appel à la solidarité. «Je tiens à présenter mes condoléances attristées aux familles des victimes ainsi qu’au peuple de Guinée, je souhaite prompt rétablissement aux blessés qui sont immédiatement et entièrement pris en charge par l’État. Je félicite les Forces de Défense et de Sécurité, les différentes unités de secours publics et privés pour leur prompte réaction en vue de porter secours aux sinistrés et maîtriser l’incendie. En attendant les enquêtes diligentées par le Gouvernement pour connaître les causes exactes de l’incendie ainsi que le bilan humain et matériel de ce drame, j’appelle à l’occasion le peuple de Guinée à la solidarité et à la prière pour la Nation en ces moments de dure épreuve.»
Malick Sankhon exprime sa compassion
Le juriste et médiateur Malick Sankhon adresse un message à ses compatriotes de Kaloum victimes d’un incendie à l’origine de l’explosion des cuves du dépôt pétrolier de Coronthie, situé à proximité du Port de Conakry, dans la nuit du 17 au 18 décembre 2023.
«En cette triste circonstance, j’exprime ma compassion à l’ensemble des populations victimes de cette catastrophe, écrit M. Sankhon. Je présente mes condoléances aux familles éplorées, au Président de la Transition, au Gouvernement et à l’ensemble du peuple de Guinée.»
Ancien ambassadeur, directeur du Protocole d’Etat sous le régime du président Général Lan-sana Conté, le juriste et médiateur «prie Dieu d’accepter les défunts dans le paradis et d’accorder un prompt rétablissement aux blessés».
- Sankhon ajoute qu’en ces moments de douleur,«nous devons observer beaucoup de prudence afin de faciliter la gestion de cette crise dont les conséquences seront énormes sur le quotidien de nos concitoyens».
Il «salue les efforts du gouvernement et (se) félicite de l’élan de solidarité en cours pour le soutien aux victimes».
Malick Sankhon, qui est ancien leader de la formation politique LCC (La cause commune) fusionné dans le Rpg Arc-en-ciel, souligne que «l’engagement de chaque Guinéen et la mobilisation collective dans l’effort national ainsi que l’aide internationale nous permettront de venir à bout de ce drame d’une ampleur rarement enregistrée dans notre pays».
Cellou Dalein Diallo appelle «à secourir et assister les populations en détresse»
L’incendie qui s’est déclaré dans la nuit du dimanche à lundi 18 décembre a fait 24 morts, 2141 ménages affectés et 11074 personnes directement impactées. Cellou Dalein Diallo n’a pas tardé à poster un message pour compatir à la douleur des habitants de la cité de Kaloum.
«C’est avec vive émotion et une profonde désolation que j’ai appris le grave incendie survenu au dépôt des hydrocarbures à Kaloum, dans la nuit du dimanche au lundi 18 décembre, entraînant un lourd bilan humain et matériel.»
Le principal leader politique guinéen ajoute: «Je tiens à adresser mes sincères condoléances aux familles éplorées et à tout le peuple de Guinée ainsi que mes vœux de prompt rétablissement aux nombreux blessés.»
«En cette malheureuse circonstance, j’exprime ma compassion et ma solidarité à toutes les personnes dans le malheur et encourage tous les guinéens qui le peuvent à secourir et assister les populations en détresse», écrit Cellou Dalein Diallo, président de l’Ufdg (Union des forces démocratiques de Guinée) et leader de la coalition politique Anad (Alliance nationale pour la démocratie et le développement).
Ouverture d’une information judiciaire sur cet incendie
Une partie de Conakry brûle. C’est le Garde des Sceaux Alphonse Charles Wright qui prend les devants. Le 19 décembre, il se rend sur les lieux de l’incendie du dépôt principal d’hydrocarbures de la Société nationale de pétrole (SGP) à Coronthie.
Face aux médias, M. Wright rappelle une évidence : «dans tous les pays du monde lorsqu’il y a incendie, le rôle de la justice est prépondérant dans le cadre de la détermination» des circonstances exactes dans lesquelles l’incendie s’est déclaré.
«L’ouverture d’une information judiciaire, sur cet incendie, indique le ministre, va être conduite par le pool des juges d’instruction qui vont travailler avec des experts à la fois nationaux et étrangers pour pouvoir informer le peuple, le moment venu, des circonstances dans lesquelles tout cela s’est passé.»
Ce 19 décembre soir, le bilan officiel de l’incendie passe de 14 à 18 morts. Entre lundi et mardi soir, les sapeurs pompiers réussissent à maîtriser le feu. Le Porte-parole du gouvernement, Ousmane Gaoual Diallo, annonce la reprise de l’approvisionnement en gasoil sur tout le territoire à partir du mercredi 20 décembre.
Par la même occasion, il affirme que le gouvernement institue un service minimum dans les administrations publiques et privées. Mais les dégâts matériels causés par le désastre sont énormes. Plusieurs bâtiments de la cité de Kaloum sont impactés. L’explosion de l’entrepôt entraîne la destruction de plusieurs immeubles de haut standing dans la Cité du chemin de fer et d’habitats riverains du dépôt de Coronthie.
Les sinistrés sont nombreux dans les rangs des habitants du quartier de Coronthie qui est aussi celui où se trouve la Maison centrale, la plus grande prison civile de Guinée. Les secouristes dénombrent 2141 ménages affectés et 11074 personnes directement impactées par l’incendie. La cité de Kaloum déplore 24 morts, 11 corps non identifiés, des portés disparus, et 454 blessés dont 423 ont regagné leurs familles.
Spéculation sur le prix du carburant
Conakry passe des jours difficiles. La solidarité nationale et internationale envers les victimes ne fait pas défaut. Cependant, la fermeture des stations-services entraîne la spéculation des produits pétroliers sur le marché.
Dès le mardi 19 décembre 2023, «le Barreau de Guinée constate avec regret qu’au lieu d’être solidaires, certains individus profitent de ce drame national pour spéculer sur le prix du carburant et certaines denrées de premières nécessités». Il déclare qu’il « condamne fermement de telles pratiques et invite les autorités guinéennes, à tous les niveaux, à prendre des dispositions adéquates en vue de mettre fin à de telles attitudes contraires à l’esprit de solidarité qui constitue l’un des éléments de notre devise».
La Société civile exige une commission d’enquête internationale
Le 25 décembre, «la société civile à travers sa diversité incarnée dans les Forces Sociales de Guinée» déclare qu’elle «salue et encourage d’avantage l’attention solidaire apportée aux sinistrés et à l’Etat à travers des assistances humanitaires, sanitaires, alimentaires, financières, logistiques et psychologiques par les différents acteurs du pays, les pays voisins et les partenaires au développement.»
Néanmoins, les Forces Sociales de Guinée «regrettent le silence intolérable des multinationales ou compagnies actionnaires du dépôt et coresponsables de sa gestion, alors que des défaillances de gestion sont indexées comme causes par le porte-parole du gouvernement et la Direction de Communication et de l’Information (DCI) de la Présidence ; interpellent, ainsi, lesdits actionnaires de la Société Guinéenne de Pétrole, pour leur part de responsabilité dans la manifestation de la vérité face à l’ampleur des dégâts avec des pertes en vies humaines et des disparitions au nombre inconnu, sans compter les conséquences écologiques et sanitaires.»
Les Forces Sociales de Guinée préviennent qu’elles pourraient «se constituer partie civile devant les tribunaux pour la manifestation de la vérité et la réparation des préjudices». Dans cet esprit, elles «demandent la mise en place d’une commission d’enquête internationale pour déterminer de façon indépendante les causes du drame face à sa complexité et à une certaine conclusion hâtive de la part de l’Exécutif aux affaires du pays sous le silence complice des actionnaires de la Société Guinéenne de Pétrole».
L’élan de solidarité
La Guinée bénéficie dans l’immédiat le soutien des pays amis comme la France, les Etats-Unis, le Japon et de ses voisins sénégalais, sierra-léonais, maliens et ivoiriens. Dès l’après-midi du 18 décembre, une équipe de secouristes sénégalais composée de 24 agents, dont des médecins militaires et des spécialistes de la brigade des sapeurs-pompiers atterrit à Conakry.
Le 20 décembre, le porte-parole du gouvernement ivoirien, Amadou Coulibaly, note qu’une délégation officielle séjourne à Conakry pour porter le message de condoléance, de compassion et de solidarité envers la Guinée. La Côte d’Ivoire offre une enveloppe financière, une aide en médicaments et en carburant estimée à plus de 8,8 milliards de Francs guinéens. Un peu plutôt, quelques heures seulement après l’annonce de l’incendie, la Sierra Leone envoie des secouristes à Conakry.
Toutefois, le Premier ministre Bernard Goumou prévient qu’une telle crise va «prendre du temps ». Le gouvernement décide donc de réquisitionner une partie des réserves de gasoil et de fioul des sociétés minières et prend des mesures visant à mettre le pays à l’heure est à la rationalisation de la vente du carburant «à 25 litres par voiture, 5 litres pour les motos et les tricycles et l’interdiction de servir les bidons».
En plus de cette assistance d’urgence léonaise, les voisins autorisent 100 citernes à s’approvisionner en carburant à Freetown pendant que d’autres camions-citernes vont ravitailler la Guinée à partir de la Côte d’Ivoire et le Sénégal.
Par Diallo Alpha
